Si le 20e siècle était celui de l'or noir, le 21e siècle sera-t-il celui de l'or rouge ?

Ces caractéristiques font de lui un élément crucial et incontournable de l’électrification et de la numérisation de nos sociétés : le cuivre. Mais, en avons-nous suffisamment pour répondre à nos besoins grandissants ? Entre véhicules électriques, énergies renouvelables et IA, plongeons dans la ruée vers l’or rouge.

Nous sommes le vendredi 16 août, la mine d’Escondida au Chili va pouvoir redémarrer après quatre jours de grève de 2400 salariés, soit la quasi-totalité des travailleurs du site minier. Quatre jours pendant lesquels le gouvernement Chilien retenait son souffle, marqué par la grève de 2017 sur le même site qui avait alors duré 44 jours et provoqué une contraction du PIB national de 1,3%, avec une perte estimée à 740 millions de dollars. Car la mine d’Escondida est la plus grande du pays et représente 5% de la production annuelle mondiale de cuivre. Le Chili est quant à lui le premier producteur mondial, avec 24% de la production en 2022. 

Le cuivre, pour quoi faire ? 

Le cuivre est le métal conducteur par excellence après l’argent. S’il peut être remplacé dans certains cas d’application, il reste peu substituable. Notre appétit pour ce métal est colossal : en 2021 la demande mondiale atteignait 30,4 millions de tonnes, couverte à 30% par le recyclage. Il est utilisé dans tous les secteurs d’activités comme le montre le schéma suivant, issu de l’étude de l’Ademe sur le numérique et les métaux pour laquelle nous réaliserons un article dédié prochainement : 

Dans le secteur du numérique, il est utilisé dans la production de circuits électriques à haut rendement énergétique. Également résistant à la corrosion, ductile et malléable, il trouve sa principale application dans tous les types de câblage : de l'alimentation en énergie électrique de la centrale électrique à la prise murale, en passant par les enroulements des moteurs électriques, jusqu'aux connecteurs dans les ordinateurs. À titre d’exemple, un téléviseur contient en moyenne 824 grammes de cuivre, et un serveur 1,5 kilogramme. En 2015, 6% du cuivre utilisé dans le monde était à destination des secteurs des technologies et de l’information et de la communication, et du divertissement & média.

Quelle évolution de la demande en cuivre dans les années à venir ? 

La demande de cuivre pourrait presque doubler d'ici 2035 et devrait continuer à croître à mesure que le monde s'engage dans la transition globale vers la neutralité carbone (ex. mobilité électrique, éoliennes, panneaux photovoltaïques). Les propriétés conductrices naturelles du cuivre en font le matériau de choix pour l'électrification, stratégie fondamentale pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'Accord de Paris. Et le numérique est également un facteur clé de l’augmentation de la demande en cuivre, notamment en raison de l’essor de l’IA. Les besoins de plus en plus importants de data centers que nous avions évoqués précédemment dans les bilans environnementaux de Google et Microsoft entraînent une consommation de cuivre extrêmement importante. Ainsi, les besoins en cuivre liés à l’IA pourraient représenter 6 à 7% de la demande mondiale de cuivre en 2050, contre 1% actuellement, selon la société minière BHP.

Va-t-on manquer de cuivre ? 

Si les ressources en cuivre dans la croûte terrestre sont importantes (environ 5000 millions de tonnes), les réserves (c’est-à-dire les gisements qui ont été découverts, évalués et jugés rentables) sont bien moins importantes, à hauteur de 870 millions de tonnes. Ces réserves représentent environ 40 années de production actuelle (moins en prenant en compte le rythme d’augmentation de la demande). L’essentiel du problème actuel réside dans la disponibilité à court terme d’une offre de cuivre permettant de répondre à la demande. En mai 2024, un rapport de l’Agence internationale de l’énergie prévoyait que les mines en cours d'exploitation et les projets qui vont entrer en production ne permettront de couvrir que 70 % de la demande de métal rouge en 2030. Les risques de tensions sont d'autant plus graves qu'on observe peu de progrès en matière de diversification géographique de la production.

Quels leviers pour faire face aux risques d'approvisionnement ? 

Comme souvent, trois axes d'action sont possibles : 

  • Sobriété : Réduire nos besoins en cuivre en limitant notre quantité d’équipements et d’infrastructures, et en limitant le renouvellement de ceux-ci
  • Efficacité : Le cuivre fait partie des métaux bien recyclés, car présent en grande quantité dans nos équipements. L’enjeu est donc d’améliorer la collecte des DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques) afin d’augmenter le volume de cuivre recyclé pour répondre à la demande. 
  • Substitution : Il est possible de remplacer le cuivre par l’aluminium dans certains cas d’application comme les systèmes de refroidissement, certains câbles et équipements électriques. L’aluminium est extrêmement abondant et présente un risque d’approvisionnement moins important.