L’IA dans l’entreprise, il n’y a pas le choix, il faut y aller, il faut investir. C’est le son de cloche dominant en ce début d’année 2025. Mais pour quoi faire ? Si vous n’avez pas de cas d’usage identifié, voici 10 bonnes raisons de ne pas adopter l’IA générative dans votre organisation juste pour faire comme tout le monde.
Le mois dernier, nous évoquions le forcing des géants du numérique pour nous pousser à utiliser l’IA. Cette pression se ressent dans toutes les organisations qui commencent à introduire l’IA “pour voir” ou par peur de se faire distancer. Sans réel cas d’usage identifié et sans avoir une quelconque idée de l’intérêt opérationnel et économique. A contre pied de toutes ces injonctions à utiliser l’IA dans votre organisation, voici aujourd’hui une liste de 10 bonnes raisons de refuser l’adoption “par défaut” de l’IA générative dans votre organisation, inspirée par les récentes publications de Richard Hannah avec son “Petit manuel de résistance aux introductions des IA dans une organisation” et Clément Marche avec son “IA Générative, mémo pour des usages conscients et soutenables”.
- Préserver l’habitabilité de notre Planète
Les modèles d'IA générative consomment une quantité colossale d'énergie, d’eau et de ressources abiotiques, pour leur construction et leur utilisation. Et cette consommation augmente de manière exponentielle. Utiliser l'IA, c’est accélérer la destruction de l’habitabilité de la Terre. Nous avions évoqué ce point dans notre article de septembre 2024 sur le bilan environnemental des GAFAM.
- Limiter les usages futiles et les effets rebonds
Plus les modèles deviennent “efficaces”, plus on les utilise et plus l’impact environnemental global augmente. C’est ce qu’on appelle l’effet rebond, très bien résumé dans cette infographie du site l’Iglou.
A l'échelle mondiale, l'AIE (Agence internationale de l'énergie) estimait début 2024 que la consommation électrique des data centers au niveau mondial pourrait doubler d’ici 2026.
- Refuser de contribuer à l’exploitation d’une main d’oeuvre invisible
Nous vous en parlions dès avril 2023 avec notre article sur la face cachée de ChatGPT, les IA génératives impliquent le recours à une main d’œuvre invisible pour entraîner les IA : une enquête du Time révélait qu’OpenAI avait contracté avec un prestataire américain employant des travailleurs kenyans payés entre 1.3 et 2$/heure afin de passer en revue et étiqueter par « catégories » des textes décrivant des scènes de torture, d’abus sexuels sur des enfants, de meurtres, etc.
- Ne pas accentuer les biais existants de notre société
A nouveau un sujet évoqué précédemment dans notre article sur les questions d’IA, de diversité et d’inclusion, les IA génératives renforcent les inégalités. Selon une étude de l'UNESCO de 2024, les LLM (Large Language Model, modèles des IA génératives) ont tendance à lier des postes de haut niveau aux hommes et des postes socialement moins valorisés aux femmes (domestique, cuisinière, prostituée)
- Réduire le risque opérationnel lié aux informations erronées
Les grands modèles d'IA inventent des "faits" crédibles mais faux. Dans un contexte professionnel, ces hallucinations peuvent entraîner des erreurs graves, des litiges et des pertes financières. Par exemple : le dernier modèle d’OpenAI (o4-mini) présente un taux de 48% d’hallucinations, selon les tests internes de l’entreprise.
- Préserver l’engagement, la motivation des collaborateurs et le sens de leur travail
En 2023, Goldman Sachs estimait que jusqu'à 300 millions d'emplois étaient menacés par l'IA générative. Et dans un contexte où le développement des compétences des collaborateurs est déjà compliqué comme nous le partagions avec l’analyse de l’étude de l’Unédic 2024 “Climat, numérique, IA : les employeurs à l'heure des transitions”, le risque de polarisation s’amplifie avec une minorité de travailleurs très qualifiés et une majorité déqualifiée ou précarisée.
- Réduire le risque économique
Les promesses de productivité et de retour sur investissement des IA génératives ne sont pas garanties pour toutes les entreprises et tous les cas d’usage, comme le mentionne une analyse du cabinet Deloitte de février 2025 : “pour certaines entreprises, un déploiement à grande échelle et un retour sur investissement optimal pourraient nécessiter plusieurs années d’ajustements. L’IA générative n’est pas une révolution instantanée, mais une transformation profonde qui exige vision stratégique, rigueur opérationnelle et engagement sur le long terme”
- Limiter la dépendance aux géants du numérique
Trois acteurs (Amazon Web Services, Microsoft Azure, Google Cloud) contrôlent 72 % du marché des infrastructures cloud à l’échelle mondiale. Adopter l'IA, c’est accepter de dépendre de leurs technologies, de leurs tarifs et de leurs politiques. On notera par exemple l’augmentation entre 12 à 22% des tarifs google workspace en 2025 suite à l’ajout automatique des fonctionnalités IA dans les abonnements.
- Rester conforme aux réglementations
L'AI Act européen impose des obligations strictes. Déployer l’IA sans une gouvernance robuste expose les entreprises à des amendes et des suspensions de service.
- Ne pas s’exposer à un risque d’image :
Malgré le forcing intensif des géants du numérique pour accélérer l’usage de l’IA, la littérature sur les nombreux impacts de celle-ci ainsi que le contexte global actuel, un usage peu pertinent voir futile de l’IA au sein d’une organisation pourrait nuire à son image de marque.